PARTIE III CHAPITRE I : LA CIVILISATION, UN HÉRITAGE

PARTIE III. LES CIVILISATIONS DE L'ANCIEN MONDE ET DU NOUVEAU MONDE COMPARÉES
CHAPITRE I.
LA CIVILISATION, UN HÉRITAGE

On pourrait définir la civilisation matérielle comme le résultat d'une série d'inventions et de découvertes par lesquelles l'homme améliore sa condition et contrôle les forces de la nature à son propre avantage. L'homme sauvage est une créature pitoyable ; comme le dit Menabosbu, dans les légendes Chippewa (peuple amériendien NdT), il est poursuivi par une "faim perpétuelle" ; il est exposé sans protection aux rigueurs de l'hiver et à la chaleur de l'été.  Une grande terreur pèse sur son âme ; toutes les manifestation de la nature - la tempête, le vent, le tonnerre, la foudre, le froid, la chaleur - sont des démons menaçants et dangereux.  Les saisons ne lui apportent ni les semailles ni la moisson ; pincé par la faim, apaisant en partie la faim perpétuelle de son estomac par des graines, des baies et des bêtes rampantes, il voit les animaux de la forêt passer devant lui, et n'a aucun moyen d'arrêter leur fuite.  Il est impuissant et misérable au milieu de l'abondance.  Chaque pas vers la civilisation est un pas de conquête sur la nature.  L'invention de l'arc et des flèches fut, en son temps, une avancée bien plus importante pour l'humanité que la machine à vapeur ou le télégraphe.  L'homme sauvage pouvait maintenant atteindre son gibier - sa faim insatiable pouvait être satisfaite ; même l'aigle, "dominant depuis sa place d'honneur", n'était pas hors de portée de cette arme nouvelle et merveilleuse.  La découverte du feu et de l'art de cuisinet fut un autre immense pas en avant.  Le sauvage, n'ayant rien d'autre que des récipients en bois pour cuisiner, recouvrit le bois d'argile ; durci la journée dans le feu.  Le sauvage apprit peu à peu qu'il pouvait se passer du bois, et c'est ainsi que la poterie fut inventée. Puis quelqu'un (si l'on en croit les légendes des Chippewa, sur les rives du lac Supérieur) trouva des fragments de cuivre pur de cette région, les battit en forme, et l'art de la métallurgie commença ; le fer fut d'abord travaillé de la même manière en transformant du fer météorique en pointe de lance. Mais il ne faut pas penser que ces inventions se sont succédées rapidement.  Des milliers, et peut-être des dizaines de milliers d'années, se sont écoulées entre chaque étape ; beaucoup de races sauvages n'ont pas encore atteint certaines de ces étapes à ce jour.  Selon le professeur Richard Owen, "l'expérience sobre et sans préjugés enseigne que les arts, la langue et la littérature connaissent une croissance lente, résultat d'un développement progressif". J'entreprendrai de montrer par la suite que presque tous les arts essentiels à la civilisation que nous possédons remontent à l'époque de l'Atlantide, en tout cas à cette ancienne civilisation égyptienne, contemporaine et émanation de l'Atlantide. "En six mille ans, le monde n'a accompli aucun progrès par rapport à la civilisation qu'il a reçue de l'Atlantide. La Phénicie, l'Égypte, la Chaldée, l'Inde, la Grèce et Rome se sont passé le flambeau de la civilisation de l'une à l'autre ; mais dans tout ce laps de temps elles n'ont rien ajouté aux arts qui existaient à la première période de l'histoire égyptienne.  En architecture, en sculpture, en peinture, en gravure, en exploitation minière, en métallurgie, en navigation, en poterie, en verrerie, en construction de canaux, de routes et d'aqueducs, les arts de Phénicie et d'Égypte se sont étendus, sans changement ni amélioration matérielle, jusqu'à une période qui remonte à deux ou trois cents ans seulement.  L'époque actuelle est entrée dans une ère nouvelle ; elle a ajouté une série de merveilleuses inventions à la liste atlante ; elle a assujetti la vapeur et l'électricité aux usages de l'homme.  Et son travail ne fait que commencer : il se poursuivra jusqu'à ce qu'il élève l'homme à un niveau aussi supérieur au présent que le présent est au-dessus de la condition barbare ; et dans le futur on dira qu'entre la naissance de la civilisation en Atlantide et la nouvelle civilisation, s'étend une période de plusieurs milliers d'années, durant laquelle l'humanité n'a pas inventé, mais simplement perpétué. Hérodote nous dit (" Euterpe ", cxlii.) que, selon les informations qu'il reçut des prêtres égyptiens, leur histoire écrite remonte à 11 340 ans avant son ère, soit près de 14 000 ans avant cette époque.  Ils l'introduisirent dans un temple spacieux et lui montrèrent les statues de 341 grands prêtres qui s'étaient succédés ; et pourtant l'époque de Christophe Colomb ne possédait aucun art, sauf celui de l'imprimerie (qui était ancienne en Chine), que les Egyptiens ne connaissaient pas ; et la civilisation de l'Egypte à sa première apparition était d'un ordre supérieur à toute période ultérieure de son histoire, attestant ainsi qu'elle tirait sa grandeur d'une source qui lui était supérieure.  C'est à ses débuts que l'Egypte n'adorait qu'un seul Dieu ; plus tard, cette croyance simple et sublime fut enterrée sous les corruptions du polythéisme.  Les plus grandes pyramides ont été construites par la quatrième dynastie, et l'éducation était si répandue à cette époque parmi le peuple que les pierres avec lesquelles elles ont été construites conservent encore aujourd'hui les écrits des ouvriers.  Le premier roi fut Ménès. "A l'époque de Ménès, dit Winchell, les Egyptiens étaient déjà un peuple civilisé et nombreux. Manéthon nous dit qu'Athotis, le fils de ce premier roi, Ménès, construisit le palais de Memphis ; qu'il était médecin, et laissa des livres anatomiques.  Toutes ces déclarations impliquent que même à cette époque, les Egyptiens étaient à un degré de civilisation avancé." (Preadamites de Winchell, p. 120.) "Au temps de Ménès, les Egyptiens étaient depuis longtemps architectes, sculpteurs, peintres, mythologues et théologiens." Selon le professeur Richard Owen, " on constate que l'Égypte a été une communauté civilisée et gouvernée " avant " l'époque de Ménès.  La communauté pastorale d'un groupe de familles nomades, telle qu'elle est dépeinte dans le Pentateuque, peut être considérée comme un premier pas dans la civilisation.  Mais de combien de temps est en avance sur cet étape,  une nation administrée par un gouvernement royal, composée de classes dans la société, avec une division du travail, dont la tâche d'une d'entre elles, assignée au sacerdoce, était d'enregistrer ou de chroniquer les noms et dynasties des rois, la durée et les événements principaux de leurs règnes !" Ernest Renan souligne que " l'Egypte au début semble mûre, vieille, sans âge mythique et héroïque, comme si le pays n'avait jamais connu la jeunesse.  Sa civilisation n'a pas d'enfance, et son art pas de période archaïque.  La civilisation de l'ancienne monarchie ne commenca pas par l'enfance.  Elle était déjà mature."
 Nous tenterons de montrer qu'elle (la civilisation égyptienne NdT) a mûri dans l'Atlantide, et que le peuple égyptien n'a pas pu la maintenir au niveau élevé auquel elle l'avait reçue, comme le montrent les pages de Platon.  Quel roi d'Assyrie, de Grèce, de Rome ou même de ces nations modernes s'est jamais consacré à l'étude de la médecine et à l'écriture de livres médicaux pour le bien de l'humanité ? Leur mission était de tuer, non pas de guérir le peuple, mais ici, à l'aube de l'histoire de la Méditerranée, nous trouvons le fils du premier roi d'Egypte, "comme médecin, et ayant laissé des livres anatomiques". Je tiens pour incontestable que, dans quelque région de la terre, l'humanité primitive doit avoir vécu pendant de vastes périodes de temps, et dans les circonstances les plus favorables, pour créer, inventer, et découvrir ces arts et ces choses qui constituent la civilisation.  Quand nous avons devant les yeux que pendant six mille ans, l'humanité en Europe, en Asie et en Afrique, quand bien même dirigée par de grandes nations et illuminée par des esprits brillants, n'a pas avancé d'un pouce au-delà des arts de l'Egypte, nous pouvons concevoir ce qu'il a fallu comme périodes de temps, comme éternités, pour amener les hommes sauvages à cette condition de raffinement et de civilisation que possédait l'Egypte quand elle entra dans le champ de l'histoire. Cet illustre Français, H. A. Taine (" Histoire de la littérature anglaise ", p. 23), voit l'unité des races indo-européennes se manifester dans leurs langues, leur littérature et leurs philosophies, et affirme que ces traits prééminents sont " les grandes marques d'un modèle original ", et que quand on les rencontre " quinze, vingt, trente siècles avant notre ère, dans un Aryen, un Egyptien, un Chinois, ils représentent l'oeuvre de nombreux siècles, voire de plusieurs myriades de siècles...  Telle est la première et la plus riche source de ces facultés maîtresses d'où jaillissent les événements historiques ; et l'on voit que si elle est puissante, c'est parce que ce n'est pas une simple source, mais une sorte de lac, un réservoir profond, où d'autres sources ont, depuis une multitude de siècles, déchargé leurs différents cours.  En d'autres termes, la capacité des Égyptiens, des Aryens, des Chaldéens, des Chinois, des Saxons et des Celtes à maintenir la civilisation est simplement le résultat d'un entraînement civilisé pendant "des myriades de siècles" en quelque lieu originel de la race. Je ne peux pas croire que les grandes inventions ont été reproduites spontanément, comme certains voudraient nous le faire croire, dans différents pays ; il n'y a pas de vérité dans la théorie que les hommes pressés par la nécessité créeront toujours les mêmes inventions pour soulager leurs désirs.  Si tel était le cas, tous les sauvages auraient inventé le boomerang ; tous les sauvages posséderaient des poteries, des arcs et des flèches, des écharpes, des frondes et des canoes ; bref, toutes les races auraient atteint la civilisation, car le confort de la vie est certainement aussi agréable pour un peuple que pour un autre. La civilisation n'est pas communicable à tous ; de nombreuses tribus sauvages en sont incapables.  Il y a deux grandes divisions de l'humanité, les civilisés et les sauvages ; et, comme nous le montrerons, chaque race civilisée dans le monde a eu quelque chose de la civilisation depuis les premiers âges ; et ainsi que "toutes les routes mènent à Rome", toutes les lignes convergentes de la civilisation mènent à l'Atlantide.  L'abîme entre l'homme civilisé et le sauvage est tout simplement incommensurable ; il représente non seulement une différence dans les arts et les méthodes de vie, mais dans la constitution mentale, les instincts et les prédispositions de l'âme.  L'enfant des races civilisées dans ses loisir fabrique des roues à aubes, des chariots et des maisons d'épis ; le garçon sauvage s'amuse avec des arcs et des flèches : l'un appartient à une race de construction et de création, l'autre à une souche sauvage de chasse.  Cet abîme entre la sauvagerie et la civilisation n'a jamais été franchi par aucune nation par sa propre force originelle, et sans influence extérieure, au cours de la période historique ; ceux qui étaient sauvages à l'aube de l'histoire sont encore sauvages ; les esclaves barbares ont peut-être appris quelque chose des arts de leurs maîtres et les races conquises ont partagé certains des avantages que possèdent leurs conquérants ; mais nous chercherons en vain quelque exemple de peuple sauvage développant la civilisation en leur sein.  On pourra me rappeler les Gaulois, les Goths et les Britanniques ; mais ce n'étaient pas des sauvages, ils possédaient des langues écrites, de la poésie, un art oratoire et une histoire ; ils étaient dirigés par des idées religieuses ; ils croyaient en Dieu et en l'immortalité de l'âme, et en un régime de récompenses et de punitions après la mort.  Partout où les Romains sont entrés en contact avec des Gaulois, des Britanniques ou des tribus allemandes, ils les trouvèrent équipés d'armes de fer.  Les Écossais, selon Tacite, utilisaient des chars et des épées de fer à la bataille des (monts NdT) Grampians, "enormes gladii sine mucrone".  Les Celtes de Gaule sont accusés par Diodore de Sicile d'avoir utilisé des lances à tête de fer et des cottes de mailles, et les Gaulois qui rencontrèrent les armes romaines en 222 avant JC étaient armés d'épées en fer doux, ainsi qu'à l'époque où César conquis leur pays. Parmi les Gaulois, les hommes pouvaient prêter de l'argent pour être remboursés dans l'autre monde et, nous n'avons pas besoin d'ajouter, qu'aucun peuple chrétien n'a encore atteint ce niveau sublime de foi ; ils cultivaient la terre, construisaient des maisons et des villes ceintes de murs, tissaient des vêtements et utilisaient des véhicules à roues ; ils possédaient presque toutes nos céréales et animaux domestiques, et ils travaillaient le fer, le bronze, et l'acier.  Les Gaulois avaient même inventé une machine sur roues pour couper leur grain, anticipant ainsi de deux mille ans nos faucheuses et moissonneuses.  La différence entre la civilisation Romaine sous Jules César et celle des Gaulois sous Vercingétorix était une différence de degré et non de nature.  La civilisation romaine était simplement un développement et une perfection de la civilisation que possédaient toutes les populations européennes ; elle a été puisée la fontaine commune de l'Atlantide. Si nous trouvons des deux côtés de l'Atlantique exactement les mêmes arts, sciences, croyances religieuses, habitudes, coutumes et traditions, il est absurde de dire que les peuples des deux continents sont arrivés séparément, par exactement les mêmes étapes, aux mêmes fins.  Quand on considère la ressemblance des civilisations des nations méditerranéennes les unes par rapport aux autres, aucun homme n'est assez stupide pour prétendre que Rome, la Grèce, l'Egypte, l'Assyrie, la Phénicie, chacune spontanément et séparément, ont inventé des arts, des sciences, des coutumes et opinions dans lesquels elles s'accordaient ; mais nous procédons à la recherche du fil conducteur de l'origine ou du lien entre elles.  Pourquoi une règle d'interprétation devrait-elle prévaloir, entre les deux rives de l'Atlantique, quand différente de celle qui vaut pour les deux rives de la Méditerranée ? Si, dans un cas, la similitude de l'origine a incontestablement produit la similitude des arts, des coutumes et de la condition, pourquoi, dans l'autre, la similitude des arts, des coutumes et de la condition ne devrait-elle pas prouver la similitude de l'origine ? Existe-t-il un exemple dans le monde de deux peuples, sans se connaître ni avoir eu de relations entre eux, aboutissant à la même invention, qu'il s'agisse d'une tête de flèche ou d'une machine à vapeur ? S'il a fallu à l'humanité un laps de temps d'au moins six mille ans avant que recommence l'œuvre d'invention et que soit repris le fil de la pensée originelle là où l'Atlantide l'avait laissé, quelle est la probabilité que trois ou quatre nations distinctes progressent toutes à la même vitesse aboutissant exactement aux mêmes arts et aux mêmes idées ?  La proposition est insoutenable. Si donc nous prouvons que, de part et d'autre de l'Atlantique, les civilisations furent substantiellement identiques, nous aurons démontré qu'elles ont dû descendre l'une de l'autre, ou qu'elles ont rayonné d'une source commune.

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